Les archives en ligne «SFL Glory» comprennent toutes les saisons de la plus haute ligue suisse depuis 1933. Comment est née cette idée, comment l’équipe de la SFL et le magazine de football «Zwölf» ont réussi à rechercher — et surtout retrouver — la totalité des données de tous les matches depuis 85 ans et pourquoi le projet revêt-il une grande importance pour la SFL?
L’IDÉE
Voici plus de dix ans, les responsables du magazine footballistique «Zwölf» déploraient qu’il n’existe aucune source fiable de données historiques concernant les clubs suisses (lisez l’entretien avec Mämä Sykora). En 2009, ils ont décidé d’approcher la Swiss Football League, lui suggérant de revisiter toutes les saisons du championnat suisse du plus haut nivéau et d’en rassembler les éléments dans une base de données. Les responsables ont donné leur accord et leur ont prodigué leur soutien.
N’empêche que le projet est resté sur le banc des remplaçants pendant un certain temps. «Nous avons d’abord dû moderniser notre propre présentation web et nous avons aussi dû convaincre à l’interne», se souvient Roger Müller, responsable médias et marketing de la SFL. «L’argument le plus évident était que le concept ‹Glory› allait nous aider à donner un vrai visage à la Ligue, traditions et rivalités du passé jouant un rôle central.»
Le coup d’envoi — entre autre avec le soutien de Raiffeisen — de la création de la première plate-forme de l’histoire du football suisse accessible au public était donné quelque cinq ans plus tard. D’une part, cela revenait à créer une source d’informations fiable sur les saisons du passé; de l’autre, la plate-forme correspondait à l’image que la SFL entendait donner d’ellemême, comme l’explique Philippe Guggisberg, responsable de la communication: «Je pense que la tâche de la Ligue est de préserver le passé et de transmettre l’histoire».
INTERVIEW
«SFL Glory», c’est quoi?
Renseignement pris auprès
de Philippe Guggisberg,
Head of Communications SFL
Que doit-on comprendre par archives en ligne «SFL Glory»?
«SFL Glory» comprend les données de toutes les rencontres disputées depuis 1933 dans la première division helvétique de football. Les visiteurs peuvent récupérer des statistiques par saisons, clubs, joueurs et entraîneurs. Par exemple pour trouver qui a marqué le plus de buts en une saison, ou pour un club en particulier, ou quel club a obtenu le plus grand nombre de victoires depuis 1933. En outre, on peut y dénicher les histoires qui se cachent derrière les faits et chiffres.
A qui s’adresse «SFL Glory»?
A tous les fans de foot, qui entendent s’informer sur l’histoire de leur club. Mais aussi aux étudiants et aux journalistes qui effectuent des recherches sur des événements du passé. Enfin, à quiconque s’intéressant à l’histoire du football suisse. «SFL Glory» devrait également être un outil encourageant le débat autour du football helvétique.
Comment «SFL Glory» se différencie des autres sources d’internet?
Tous les matches disputés depuis 1933 ont été systématiquement recensés, traités et consignés électroniquement dans une base de données. Par conséquent, «SFL Glory» est la source la plus fiable en matière de données historiques sur les clubs suisses.
Le championnat Suisse existe depuis 1897. Pourquoi les archives «SFL Glory» ne remontent-elles que jusqu’en 1933?
La saison 1933/34 était la première d’un championnat national unifié. A l’époque, la Ligue Nationale se disputait avec 16 équipes. C’était donc le début du championnat de Suisse de l’ère moderne.
LA RECHERCHE DES SOURCES
La SFL et «Zwölf» ont relevé un défi de taille. Tous les matches d’une période de 85 ans, englobant la Ligue Nationale A (de 1933 à 2003) et la Super League (née en 2003), devaient être recensés et répertoriés dans une banque de données. Pour «l’ère moderne », on pouvait s’appuyer sur des données existantes. La SFL et la société de production télévisée NEP Suisse collectent par voie électronique les données de chaque match (lire l’article «Pas le moment de jubiler») depuis 2008. De son côté, l’Association Suisse de Football (ASF) avait dans sa base de données «NIS» des informations sur les saisons 2003—2008.
La situation était plus délicate pour ce qui est des années antérieures à 2003 et, en particulier, pour les périodes «historiques» ne disposant pas encore de moyens électroniques d’archiver les informations et télégrammes de match. Philippe Guggisberg connaissait ce défi. En 2009, le responsable de la communication de la SFL a été l’initiateur et le co-auteur du livre «75 ans Swiss Football League — Ligue Nationale ASF», qui retraçait le football des club suisses depuis des années 1890. «Il n’existait aucune base de données auparavant. La Ligue Nationale publiait dès les années 50 son rapport annuel, présentant le classement final et un résumé, mais faisant fi des données de chaque match, soit scores, spectateurs, formations d’équipe, buteurs, etc. Personne à l’époque n’avait pensé à transmettre à la postériorité les faits et chiffres.»
Néanmoins, le «Team Glory» a trouvé un moyen de récupérer les informations et enregistrements de l’époque (pour en savoir plus, lisez l’interview de Mämä Sykora). Les télégrammes de match, publiés dans les journaux de l’époque, constituaient les meilleures sources. Philippe Guggisberg: «De par leur travail, les journalistes sont devenus de véritables archivistes, un peu malgré eux. On n’a pas connaissance d’autres sources. Il existait certes une feuille de match, remise à la Ligue à l’issue des rencontres. Cependant, on en ignore le contenu, aucun document n’étant encore disponible aujourd’hui.»
Dans les archives de divers journaux, on a retrouvé tous les télégrammes de match depuis 1933. Une équipe du magazine de football «Zwölf» les a photographiées systématiquement, les consignant dans la base de données. En cas d’informations manquantes ou contradictoires, on a eu recours aux publications locales ou aux rapports annuels des clubs. C’est ainsi que le puzzle de l’histoire du football suisse a été assemblé pas à pas.
L’ode aux télégrammes
de match
«Les télégrammes de match sont l’information condensée du football. Rien, hormis les faits nus, n’y trouve place: noms, scores, minutages. Ils sont réduits aux strictes vérités immuables. Ces infos brutes n’offrent pas la moindre cible. Même les supporters munis de lunettes à double vitrage de leur club n’y trouveraient quoi que ce soit pouvant être interprété comme une attaque contre leur club.
L’expression «en style télégraphique» va bien au foot! Malgré la compression absolue des informations, tout le match y est résumé. Le télégramme de match est semblable à un trou noir, manifestation céleste si compacte qu’elle empêche toute matière de s’en échapper, «noir» signifiant invisible en astronomie. Seulement, il suffit de le disséquer attentivement pour voir tout le déroulement.»
Extrait de l’article, en allemand, «Klein-Klein-Spiel»,
de Mämä Sykora, «Zwölf» #51
LA BASE DE DONNÉES
Pour «SFL Glory», la Ligue a constitué, en collaboration avec l’entreprise «KOCH — agence de communication», une base de données stockant toutes les informations passées et nouvelles en temps réel. La base de données a été alimentée par des informations provenant de diverses sources:
Les données ont été fusionnées, comparées et revérifiées en cas d’informations contradictoires. Les statistiques actuelles sont automatiquement, et au fur et à mesure, répercutées dans «SFL Glory», à partir de la banque de données NEP, conçue pour publier les statistiques en direct pendant un match.
L’AFFICHAGE
Le dernier défi du «Team Glory» consistait à présenter de manière appropriée les données saisies. Les défis étaient nombreux et, pour certains, inattendus. Ainsi, dès 2003 (création de la Super League), le nombre d’éléments disponibles était nettement supérieur aux premières saisons, où seuls les compositions d’équipe, les scores, les buteurs et les spectateurs étaient pris en compte. Par conséquent, il a été décidé de ne tenir compte que des données existantes pour toutes les années pour les statistiques globales établies de 1933 à nos jours. Pour les saisons impliquant des rencontres de promotion/relégation, il s’agissait de déterminer si les matches concernés devaient tous être pris en compte ou exclusivement ceux qui impliquaient des équipes de la première division. «Si la recherche des données était un défi lancé à temps, la manière de présenter les données était carrément un casse-tête», déclare Silvio Kern, responsable de la plate-forme numérique de la SFL.
L’édition Glory publiée en novembre 2018, permet aux internautes de compiler et de classer les statistiques de manière thématique par saisons, clubs, joueurs et/ou entraîneurs. Par exemple, vous pouvez créer une statistique de joueurs perpétuelle indiquant quel joueur a marqué le plus de buts depuis 1933 (Jacky Fatton) ou qui a joué le plus de matches (Philippe Perret).
Les données peuvent être filtrées selon la (les) saison(s) ou club(s) voulus. Vous trouverez, par exemple, que Charles Amoah (FC St-Gall) était le premier «Roi des buteurs» du nouveau millénaire, que son coéquipier Jörg Stiel était, cette saison 1999/2000, le joueur ayant joué le plus grand nombre de minutes pour le champion de Suisse d’alors; toutes les infos possibles et imaginables seront rappelés à notre mémoire.
Philippe Guggisberg pense que ce n’est qu’un début: «Glory offre de la place à toutes les histoires qui se cachent derrière les chiffres. L’avenir nous permettra encore d’ajouter moult renseignements, notamment le pedigree de tous les joueurs, ayant évolué depuis 1933/34 en Ligue Nationale ou en Super League. Nous ne faisons que commencer à raconter l’histoire des clubs à travers le championnat de Suisse.»
TOTAL DES DONNÉES
TOTAL DES JOUEURS
NOMBRE DE BUTS